Coup d’État au Niger : la Cédéao peut-il intervenir militairement?

 


Coup d’État au Niger pour répondre, la Cédéao a indiqué qu’elle prendra toutes les mesures nécessaires. En plus des sanctions économiques décidées dimanche 30 juillet, cela peut inclure l’usage de la force. Mais si le sujet d’une force militaire commune de l’organisation économique d’Afrique de l’Ouest est régulièrement mis sur table, les choses avancent lentement.

La Cédéao a décidé de renforcer les forces en attente de l’organisation (FAC) depuis fin 2022. Le sujet a même été évoqué lors du sommet en Guinée-Bissau au début du mois de juillet. D'après le document de préparation de ce sommet que RFI avait pu consulter, les chefs d'État s'étaient mis d'accord pour réfléchir à la mise en place d'une force militaire commune.

Celle-ci pourrait intervenir dans deux cas, d'après les observateurs et les participants aux discussions. Le premier serait lors de missions offensives, de recherche et de destruction pour lutter contre les groupes terroristes actifs : il s'agirait alors de la protection des civils en appui et en collaboration avec les armées régulières locales.

Deuxième cas de figure d'intervention, lors duquel ces effectifs sous bannière de la Cédéao pourraient intervenir, serait en cas de menace sur l'ordre constitutionnel. Par exemple, lorsque des personnes tentent de renverser le pouvoir en place par l'un des pays membres. C'est sur ce dernier point que l'opération militaire au Niger, qui n'est pas exclue par la Cédéao, pourrait se reposer.

En ce moment, peu de détails ont émergé sur cette force conjointe, notamment sur son financement. Mais l'objectif évoqué à l'issue du sommet de Bissau serait d'attendre 5 000 hommes, issus des rangs des pays membres. Face à l'urgence de certaines situations sur le terrain, la plus récente étant le Niger, la Cédéao aimerait toutefois atteindre rapidement la brigade de 1 650 soldats disponibles.

Depuis une dizaine d'années, l'organisation envisage de redonner du souffle aux FAC de la Cédéao. Cela n'a pas abouti jusqu'à présent, mais des discussions sur le sujet lors des dernières réunions pourraient faire avancer des choses.

Le problème est autour du financement, de l’équipement et des effectifs même restent toutefois les principaux points de blocage. Une réunion autour de la situation au Niger devrait avoir lieu aux prochains jours et permettre de discuter de ces sujets.

Mûri depuis plusieurs années, ces FAC ne font que prendre de relais d’une force créée aux années 1990 sous l’impulsion du Nigeria. Au début de la guerre civile au Liberia, l’Écomog entendait superviser des cessez-le-feu et maintenir la paix, à l'instar des Casques bleus de l’ONU. À l’image de ces derniers, les effectifs de l’Écomog sont appelés : casques blancs.

Depuis sa création, cette force est dirigée par le Nigeria qui lui fournit la plus grande partie des soldats, des équipements et même des financements. Au début de l'opération au Libéria, l’Écomog compte environ 500 hommes, mais ses rangs gonflent rapidement pour atteindre plus de 20 000 soldats en 1994.

La première intervention ne se fait pas sans critiques. Les populations accusent les soldats, surtout nigérians, de pillage, de viol et de meurtre. Les Nations unies finiront par reconnaître implicitement l’Écomog comme une faction combattante et la soumettra à un embargo sur des armes.

Le souvenir laissé par cette première intervention de l’Écomog, qui a duré jusqu'en 1999, est loin d'être encourageant. Mais cela n’empêche pas la Cédéao de mobiliser à d’autres reprises cette force mutualisée.

Missions sporadiques jusqu’en 2017 


Des effectifs de l’Écomog sont également envoyés en Sierra Leone en 1997, arrivant avant même les troupes onusiennes. Deux ans plus tard, en 1999, c'est à la demande du président bissau-guinéen Bernardo Vieira que 600 soldats débarquent à Bissau : ils n'y resteront que quelques mois.

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Au même année de 1999, la Cédéao installe l’Écomog de façon permanente dans ses statuts. Elle est ensuite déployée en Côte d'Ivoire.

L’Écomog est remplacée par les FAC en 2004, composée de militaires, de policiers et de civils. Ses effectifs interviennent au Mali en 2012, puis en 2017 au Gambie.

Mais selon plusieurs observateurs, cette force opérationnelle est au point mort. Les prochains jours et une éventuelle réaction militaire pourraient donc donner au bras armé de la Cédéao un nouveau souffle.